

A Cuba, la bronca des étudiants contre les nouveaux tarifs de téléphonie mobile
Le mécontentement des étudiants reste vif à Cuba face aux nouveaux tarifs de l'internet mobile appliqués par la compagnie de télécoms nationale, certains ayant même appelé à une grève des cours mercredi.
Cette nouvelle tarification, en vigueur depuis six jours et qui implique une très forte hausse des tarifs pour tout dépassement du forfait de base, lui-même drastiquement limité, et une dollarisation partielle du service, a suscité une vague d'indignation chez les Cubains, et en particulier chez les étudiants.
"Ce service d'Etecsa (la compagnie de télécommunications) ne nous convient pas du tout, ni à nous les étudiants, ni d'ailleurs à personne dans la population", explique à l'AFP Rafael Gomez, 18 ans, devant l'imposant escalier de l'Université de La Havane où il est venu faire des démarches pour son inscription.
"Nous étions habitués à un certain système" qui permettait de recharger son téléphone avec du crédit prépayé autant de fois que désiré, "mais maintenant nous sommes limités (à un forfait de base mensuel) de 360 pesos" (3 dollars) et "cela complique les choses".
"Avec 6GB, on ne fait rien, et si tu veux acheter davantage (de crédit), ça coûte plus de 3.000 pesos et avec un salaire normal ici à Cuba, ça ne suffit pas", souligne-t-il, alors que le salaire moyen sur l'île est de 5.700 pesos (47 dollars).
Dès l'entrée en vigueur des nouveaux tarifs, sans aucune annonce préalable mais justifiés ensuite par Etecsa par la nécessité de financer de nouveaux investissements, les organisations étudiantes ont exprimé leur insatisfaction.
Elles ont insisté sur la nécessité pour les étudiants d'avoir accès à internet pour le bon déroulement de leurs études.
Face à la bronca, le président Miguel Diaz-Canel a déclaré dimanche être "attentif" aux critiques sur les nouveaux tarifs, et assuré que "des options sont étudiées pour les secteurs les plus vulnérables, parmi lesquels nos chers étudiants".
Plusieurs réunions ont eu lieu entre des représentants étudiants et des responsables d'Etecsa, dont des dirigeants ont participé à des programmes à la télévision d'État pour justifier les nouveaux tarifs.
Lundi soir, l'entreprise a annoncé que les étudiants auraient finalement droit à deux recharges mensuelles de base, contre une seule pour le reste de la population, et a dit étudier d'autres mesures correctives, sans pour autant calmer la grogne.
- "Intentions révolutionnaires" -
"Les étudiants ont montré qu'ils reconnaissaient les progrès dans les négociations (...) mais nous en demandons davantage", a expliqué à l'AFP José Almeida, président de la Fédération étudiante universitaire (FEU) de l'Université de La Havane, une organisation officielle.
Mardi soir, de façon indépendante, l'antenne de la Fédération de la Faculté de mathématiques et d'informatique a appelé à une grève des cours pour obtenir la "révocation" pure et simple des nouveaux tarifs.
"Nous appelons à partir du mercredi 4 juin les étudiants à ne pas assister aux activités académiques, en signe de protestation", a-t-elle fait savoir dans un communiqué diffusé sur sa chaîne Telegram, auquel l'AFP a eu accès.
Elle a également invité la direction de l'Université "à reconnaître comme légitime cette protestation (...) afin d'éviter la déformation de nos intentions révolutionnaires".
La FEU de la Faculté de philosophie, histoire et sociologie a qualifié de "légitime" l'appel à la grève, et des étudiants de la Faculté des arts et lettres ont dit rejoindre le mouvement.
Mercredi, il était difficile pour l'AFP de confirmer si l'appel à la grève était suivi. Un étudiant de la Faculté des arts et lettres qui s'est rendu en cours a toutefois indiqué sous couvert d'anonymat qu'il "n'y avait pratiquement pas d'étudiants" dans sa faculté.
"Rien ni personne n'interrompra nos processus d'enseignement avec des convocations totalement éloignées de l'esprit qui a animé les échanges avec les organisations étudiantes", a cependant mis en garde la direction de l'Université de La Havane.
A la tête de la FEU nationale, José d'Almeida a exprimé son désaccord avec l'appel à la grève, mais "nous respectons la position" et "il n'y aura jamais de confrontation entre étudiants", a-t-il assuré.
Brian Gamez, étudiant en histoire et en marxisme-léninisme, s'est dit favorable auprès de l'AFP à des "protestations pacifiques", mais veut surtout éviter que la situation dégénère dans du "vandalisme".
E.Blomberg--StDgbl